La navette qui ramenait la Garde Noire au bercail revint à sa baie d'amarrage quelque dizaines de minutes après être partie, et elle revenait - heureusement - pleine. Les hommes qui en sortirent avaient l'air exténués, mais ravis d'avoir terminé leur mission, et surtout, de l'avoir menée à bien. Ils escortaient un autre Turien, à l'air abattu, certes, mais néanmoins digne. Il portait une lourde armure frappées de deux blasons, celui du Conseil et celui de la Hiérarchie. Il portait également des menottes : c'était donc un prisonnier. Et non des moindres, étant donné que tout le monde se retournait sur son passage. Forcément, voir un mort marcher parmi les vivants, ça surprenait. Le groupe de Gardes fut conduit jusqu'à une des salle de réunion de l'Invictus, où le prisonnier fut assis sur une des chaises, tandis que les Gardes patientaient debout.

Quelques instants après, le Primarque pénétra dans la pièce, salua ses hommes, et les pria de s'asseoir également. Pendant quelques secondes, Artérius ne dit mot ni ne bougea, se contentant d'observer Pallin attentivement. A la fin de son examen, Artérius prit la parole.

- Félicitations, messieurs, pour nous avoir ramené une aussi grosse prise. Lieutenant Vissal, le rapport préliminaire que vous m'avez fait dans la navette sera pour l'instant suffisant. J'attends cependant votre rapport complet sur mon bureau ce soir. Nous ferons le débriefing demain avec votre unité et les chefs du 40^ème. Je pense que vous rêver actuellement de vous reposer, aussi je ne vous retiendrais pas plus longtemps. Messieurs, allez vous reposer, c'est un ordre.

La dernière phrase était prononcée avec humour et un petit sourire sur le visage. Une fois que toute la petite troupe fut sortie, il ne resta plus qu'Artérius et Pallin dans la grande salle de réunion. Les deux Gardes qui accompagnaient leur Primarque en toute occasion étaient restés dehors, mais restaient sur leurs gardes, au cas où ...

- Exécuteur Pallin, donc ... C'est un véritable plaisir et un honneur de vous rencontrer. Mon lieutenant m'a dis que vous l'aviez combattu, aidé, puis trahi. Malgré l'invraisemblance d'une trahison, je ne peux nier la réalité à cause du simple fait qu'elle ne me plait pas. J'attendait un invité et deux prisonniers, et je n'ai finalement qu'un prisonnier, celui qui devait être invité. Aussi, je commencerais par une simple question : pourquoi ? Pourquoi avoir trahi les vôtres et le Conseil ? Le Lieutenant Vissal suppute que c'est à cause de la peur du Courtier de l'Ombre. Je dois avouer que j'ai du mal à y croire. Un homme tel que vous, avoir peur d'une ombre qui se terre on ne sait où ?

Quand Artérius eu fini de s'adresser à Pallin, il remarqua que le Lieutenant Vissal était resté dans l'embrasure de la porte. Ce dernier s'approcha de son Primarque et lui tendit l'OmniTech de Pallin en s'excusant. Il fit ensuite une demande pour le moins inattendue, mais néanmoins logique.

- C'est tout à votre honneur de vouloir protéger notre compatriote, Lieutenant, mais ne vous inquiétez pas, j'avais bien compris tout l'impact des décisions de Monsieur Pallin sur votre survie. Quant à votre demande, elle est relativement inhabituelle, mais je comprends que vous soyez aussi désireux que moi de savoir pourquoi vos amis et collègues sont morts, et pourquoi Pallin a laissé filer vos cibles. Soit, asseyez-vous, et n'hésitez pas à apporter vos lumières si nécessaire.

Le Primarque commençait à bien l'aimer, ce Lieutenant. Il était sérieux, efficace, obéissait aux ordres, mais n'hésitait à faire ce qui était juste et ce qu'il estimait nécessaire, même si cela devait lui valoir un blâme. Il n'avait pas dû être ravi d'avoir dû exécuter les prisonniers "inutiles" ... Enfin, ce n'était pas un enfant, et il s'en remettrait. Après tout, même s'il ne le savait pas, il avait fait ce qui était juste et nécessaire. Ces criminels avaient asservis la population de la Citadelle et ne méritaient pas de pitié. De plus, le prochain gang qui voudra s'opposer à la Hiérarchie saura qu'elle ne fait pas de quartier, et cela les fera peut-être réfléchir à deux fois ...

- Vous vous étonnez que je vous appelle encore Exécuteur ? Je ne reconnais pas l'autorité de vos "successeurs", et je trouve que votre "assassinat" a été une des plus grosse erreur du Conseil. Je ne sais pas exactement de quoi ils vous accusaient, mais l'assassinat n'est pas un substitut à la justice ... Et même si vous avez été en relation avec le Courtier, je gage que les compteurs sont à zéro. Je vous vois mal partir avec des dettes. Vous ne lui deviez plus rien. Je doute qu'il vous en veuille pour avoir puni l’incompétence d'un de ses agent. Quant à son bras long, je le vois mal se venger sur la Hiérarchie. Si quelqu'un est à punir, c'est ce Sarkass, qui a échoué dans la mission que lui avait selon toute vraisemblance donné le Courtier.

Artérius fit une pause, le temps que Pallin enregistre tout, puis il reprit :

- Comprenez-moi bien : j'ai bien conscience que vous n'êtes pour rien dans la mort de mes hommes. Ce que je vous reproche, c'est d'avoir laissé s'enfuir le vortcha. L'agent du Courtier, je n'en ai cure. Alors si vous pouvez contacter vos hommes qui ont exfiltré le rebelle, et que vous me l’amenez, je suis prêt à vous libérer, vous, vos hommes, ainsi que l'agent du Courtier.

Un interrogatoire. A deux contre un. Une bonne vieille technique quoique Pallin fut assez étonné qu'ils n'eurent pas recours au "bon flic - méchant flic". Sûrement avaient-ils pris en compte le fait que Pallin avait dirigé pendant longtemps un service de police où les interrogatoires sont nombreux et où les stratégies fines font loi. Bien que le jeune Lieutenant se prêtait tout à fait au rôle de celui qui devait inspirer l'amabilité, la conciliation, la solution facile. Erreur tactique pour ses interlocuteurs, mais Pallin dût se résoudre a accepter telles quelles les possibilités qui s'offraient à lui.

Le Primarque ne l'impressionnait pas. Il devait déjà en premier lieu être plus jeune que lui et disposant de moins d'expérience. Si Pallin s'était amusé à s'imaginer Primarque, il saisissait maintenant ô combien il était heureux de ne pas disposer de ce titre des plus honorifiques au sein de la Hiérarchie. Car il était en train de perdre son temps à traiter avec lui au lieu de combattre flottes et armées au nom du Conseil et de la Hiérarchie. Ce qu'avait tenté de faire Pallin avec RéGénésis.

"Certes, certes. Je ne cautionne pas votre exécution sommaire d'innocents qui ne cherchaient qu'à faire ce qui leur semblait juste - comme vous il n'en est pas à douter - c'est à dire empêcher les forces hostiles d'atteindre le Panneau. Oui, je sais, ils ont presque réussi. Voyez comment je vois la situation de mon point de vue... Mais là a priori n'est pas le but de votre question.
"Je veux bien consentir à rappeler la frégate - même si je crains qu'il ne soit légèrement trop tard, surtout que je vous crois savoir en collaboration avec l'Alliance dans cette affaire. Entre nous, ils ont agi comme l'aurait fait un enfant inéduqué. Je veux bien la rappeler. A une seule condition. Lâchez l'humain. D'ailleurs... Je ne serais pas surpris que l'humain ait tué le Vorcha avant qu'il n'arrive dans vos pattes."

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Après s'être adressé au Primarque et sans lui laisser le temps de formuler une quelconque réponse dont il se fichait en réalité, il se tourna vers le jeune Lieutenant assit de l'autre côté de la table de l'austère pièce d'interrogatoire :

"Lieutenant Vissal. Quand vous aurez vu vos anciens compatriotes tuer devant vos yeux des gens auxquels vous avez redonné espoir, redonné vie et une noble cause et que vous avez formé afin qu'ils fassent quelque chose de juste... Seulement à ce moment-là vous comprendrez quel est l'importance du choix fait. Il n'existe plus de bon choix ou de mauvais choix dans ces situations là. Ce n'est que suivre votre instinct qui compte.
"Pour finir, Primarque. Ne vous croyez pas si intouchable au sein de votre précieux Cuirassé. Les moyens du Courtier sont nombreux. La Hiérarchie n'est pour lui qu'une pièce de plus sur son échiquier - une pièce lourde et difficile à tomber -, mais je peux sans hésiter oser dire que votre équipage, aussi formé, loyal et dévoué qu'il est, est sans doute constitué d'une ou deux personnes qui ont des activités parallèles douteuses. Ce n'est pas une menace de ma part... juste un rappel appuyé par mon expérience en la matière."

Le Lieutenant Titus Vissal pourrait s'avérer d'une aide précieuse dans ce dialogue. Il avait côtoyé Pallin, très peu de temps, il est vrai, mais c'était toujours plus que la plupart des personnes présentes sur ce vaisseau. De plus, il avait vu de prêt ses réactions par rapport à une multitude de stimuli, et il paraissait le plus à même de le jauger et d'anticiper ses réponses et réactions. Ses ajouts à la conversations étaient les bienvenus, étant donné que l'ex-Exécuteur ferait plus volontiers confiance à quelqu'un qui s'était battus à ses côtés qu'à un parfait inconnu - inconnu qui tenait la vie de Pallin entre ses mains, certes, mais inconnu tout de même.

Lorsque l'Executeur reprit la parole, ses propos firent tiquer Artérius. Des innocents ? Ah ! Elle était bonne, celle-là. Les gens qui avaient été exécuté étaient des criminels notoires, qui avaient exploités la populace de la Citadelle pendant de nombreuses années. Quant à ReGenesis, ils étaient coupables pour bien des raisons. Auprès de la population de la Citadelle pour leur inaction : s'ils avaient agis, au lieu de simplement se terrer dans leur tour en attendant un éventuel changement, l'ancien centre galactique aurait pu être pacifié bien avant cela ... Ils étaient également coupables auprès de la Hiérarchie pour avoir stupidement attaqué des troupes sans la moindre considération pour leur mission, qui était la même que la leur. Enfin ... Comme l'avait dit Pallin, là n'était pas la question, et qu'importe si l'Exécuteur se sentait lésé, tant qu'il coopérait.

Artérius ouvrit un tiroir, fouilla un petit peu, puis sorti un OmniTech vierge, qu'il jeta à Pallin, qui le rattrapa au vol.

- Voilà de quoi communiquer avec votre vaisseau, Exécuteur. Nul doute que vous connaissez par coeur la fréquence. Et pour votre gouverne, je ne me sens pas intouchable, pas même dans mon propre vaisseau. Seulement, le Courtier n'a aucun intérêt à me tuer, ni même à renverser notre gouvernement. Je ne lui cherche nulle querelle. J'ai fait ce que j'ai fait pour la grandeur de la Hiérarchie et pour le bien du Conseil, et je n'hésiterais pas un seul instant à le refaire. L'agent du Courtier s'est simplement retrouvé dans les lignes ennemies. Mais tant qu'il ne tente pas de faire la même chose avec l'une de mes planètes, je ne mènerais pas de vendetta contre lui, pas plus que je ne chercherais à démasquer mes gens qui lui fournissent des informations. C'est là la règle du jeu, et soyez assuré que le Courtier est autant une pièce sur l'echiquier que la Hiérarchie.

- Vous avez tout mes remerciements, Exécuteur. Ceci étant fait, je vais vous faire accompagner jusqu'à vos appartements. N'hésitez pas à demander si vous avez besoin de quoi que ce soit.

Tout se déroulait comme prévu. La fuite du chef rebelle avait certes été un élément gênant, mais tout était réglé, et la capture du vortcha n'était plus qu'une question de minutes. Artérius se leva de son fauteuil, rangea l'OmniTech qui lui avait rendu Pallin, et l'accompagna jusqu'à la porte. Il demanda aux Gardes Noirs en faction d'emmener l'Exécuteur jusqu'au quartiers des invités, et alors que le premier ouvrait la marche, suivi par Pallin, le second s'attarda auprès de son Primarque à la demande de ce dernier.

- Coupez tout les appareils qui pourraient lui permettre de communiquer avec l'extérieur, et branchez les caméras. Je veux également un homme en poste devant sa porte à toute heure. Il est notre invité, mais je ne veux pas qu'il esquisse un geste sans en être averti.

Le Garde hocha la tête en signe d'assentiment, puis rattrapa son collègue.