Avilissant.
Voilà bien plusieurs siècles que la probatrice n'était pas retournée dans ce secteur, une zone à l'ombre des républiques qui contenait son lot de secrets et de mystères, le plus à l'abri possible du reste de la communauté galactique. A vrai dire, son dernier souvenir sur place remontait même à la fin du combat contre la menace écarlate, une époque où elle servait encore dans l'armée asari, à l'aube d'une longue période de prospérité galactique désormais révolue.
Les raisons qui amenaient la vieille asari à parcourir à nouveau cet espace étaient loin d'être positives, mais elles avaient au moins l'avantage d'être claires et concises. Les agents asaris sur les traces de la secte crépusculaire avaient réussi à retrouver un flux de données perdu dans les systèmes Terminus, désormais entre les mains de ce groupuscule qu'il fallait mieux ne pas nourrir de la sorte. Remonter la piste avait révélé la présence d'une taupe au sein d'un des réseaux scientifiques les plus élaborés des Républiques, un agent pathogène dont il fallait s'occuper pour colmater la brèche.
Un sevrage, en quelque sorte.
Mais la route de la probatrice avait croisé celle d'un envoyé du Conseil et de la pire sorte qui soit. Un spectre. Qu'un agent possédant autant de libertés s'enfonce si profondément en territoire asari n'était jamais un bon signe, autant pour ses motivations que pour les dégâts qu'il pouvait causer. Le fait qu'il s'agisse d'un galarien ne rassurait en rien la probatrice. Dénués d'honneur et prêts à tous les coups bas, ils devenaient imprévisibles et particulièrement irritants.
Raison pour laquelle Lumya se devait de surveiller l'animal, au point de partager la même navette que la sienne. Un sacrifice nécessaire pour palier au déshonneur potentiel que le batracien promenait avec lui en permanence.
Avilissant.
La situation s'empira d'ailleurs lorsqu'il prit la parole, une expression de dégoût se dessina sur le visage de l'asari à la simple idée que le galarien puisse se considérer comme son égal. Une idée ô combien saugrenue et qui irrita davantage la probatrice de par la similarité de son objectif avec le sien.
Cela ne vous regarde en rien, batracien. Mais vous aurez tout le plaisir de découvrir sur place que certains se préoccupent des menaces existantes et ne restent pas focalisés sur celles qui sont déjà mortes. Elle ne daigna même pas lui adresser le moindre regard, avachie sur son siège et étalant ses longues jambes sous les instruments de bord. Un léger sourire étira cependant ses lèvres.
Mais il n'y a rien à craindre, le manque de vision disparaît peu à peu avec les siècles, selon certaines. ***
Comme attendu, l’accueil sur place fut loin d'être chaleureux. Les deux combattants attendaient patiemment les résultats de leur scan devant une sécurité au poil hérissé de voir débarquer subitement deux inconnus. La navette s'était amarrée sur l'unique spatioport de l'astre, un goulet d'étranglement qui permettait de contrôler rapidement les entrées et sorties de par le simple fait qu'il était impossible de trouver le moindre véhicule spatial en dehors.
Lorsque l'identité des deux invités surprises fut révélée, le comportement des gardes asaris changea rapidement. Il fallait dire que voir débarquer deux si grosses pointures n'était pas pour rassurer, dans tous les sens du terme d'ailleurs.
Lumya fut la première à quitter le spatioport sous les regards illuminés des plus jeunes asaris du groupe. Elle ne portait qu'une combinaison légère sans le moindre armement, se déplaçant au gré d'une démarche souple et noble trahissant l'arrogance et la fierté qui émanait de son rang. Son regard était envahit d'une détermination sans faille, scrutant un temps seulement tout objet qui avait l'audace d'éveiller la moindre pointe de curiosité en elle.
Mais lorsque le galarien tenta de pénétrer à son tour dans le complexe, l'une des gardes asaris dressa son bras sur son chemin pour le stopper.
Je suis désolée... Mais aucune arme n'est autorisée à l'intérieur. Des mots qui tombèrent dans l'oreille de la probatrice, cette dernière retenant un soupir. La jeunesse faisait parfois montre d'un manque flagrant d'expérience et de jugeote. La vieille asari revint donc sur ses pas, posant une main qui se voulait délicate sur l'épaule de la jeune garde.
Ma sœur, il est inutile de vous en tenir au protocole dans ces circonstances, croyez en mon expérience. Le regard appuyé de la probatrice ne dura que quelques secondes mais fut suffisant pour la faire flancher, l'asari s'écartant du duo pour reprendre sa position initiale. Lumya posa alors son regard sur le spectre, souriant légèrement.
N'oubliez pas batracien, je vous surveille.
Il lui restait un dernier détail à régler avant d'entamer pleinement sa mission, la vieille asari se détourna donc pour s'entretenir avec la gérante de la sécurité. Il lui fallait s'assurer que sa proie n'avait aucune voie de fuite possible, absolument rien ne devait être en mesure de l'empêcher d'affronter son tout dernier jugement.