Le village - Conte

Il était une fois, dans un village des plus charmants, un monstre pernicieux qui finit pendu par des hommes de bien. Pernicieux car il n'avait pas la décence, comme tout les bons monstres, d'être hideux. Pire! Affront parmi les affronts, il avait le culot, l'indécence même de ressembler à un humain! Il put ainsi tromper les habitants en toute impunité, des années durant.
De par ses traits si doux, pourtant oh si faux maintenant qu'on sait, il était venu au village. Un enseignant, disait-il, savant parmi les savants. Un qui pouvait leur apprendre tout, notamment aux enfants. Duperie que cela! Hélas, on s'en rendit compte que trop tard.

Au début, tout allait bien. Le drame avec la félonie bien dosée, bien ficelée, c'st qu'elle n'apparaît qu'une fois tout terminé. Il se montrait gentil avec les bambins, et d'une justesse qui ne pouvait qu'être factice. Il avait de l'aide pour éduquer, en la présence de la charmante Lavandière. Elle n'avait rien vue non plus, pauvre petite sotte, charmante naïve. Mais personne n'avait put non plus, alors comment lui en tenir rigueur?

L'enseignant menait si bien sa mission qu'on voulu tout lui offrir: Banquets, gala, demeure... Il refusa. Même la main de la Lavandière, rendez-vous compte! Son bonheur se trouvait, disait-il, ailleurs. Dans le sourire des enfants, le bonheur des parents.
Ah, le vilain aveu qu'il faisait là! Qu'est-ce triste que personne n'ait rien compris en ce temps-là....

La vérité, on ne la découvrir que plus tard, bien plus tard, quand il l'était trop. Par un de ces charmants été, qui ne laisse en rien présager de l'horreur.

Ce fut la Lavandière qui vit tout. La pauvre petite, confrontée à cela!

Elle allait à la grange, où l'on y entreposait les affaires. Elle entendit des bruits, n'en tenu pas rigueur, et ouvrit. Et le spectacle si choquant s'offrit à elle. L'enseignant, si doux, si aimant, cajolait dans ses bras sa pauvre victime. La femme hurla avant de s'évanouir, prévenant tout les hommes du village, qui accoururent. A l'horreur, ils ne purent réprimer leurs cris.

On attrapa le monstre, le sépara de sa pauvre victime. Le pauvre petit pleurait toutes les larmes de son corps, suppliait qu'on laisse le professeur. Pauvre, pauvre âme malmenée, qui croyait voir dans le criminel un ami. Comment lui tenir rigueur, quand on a été ainsi torturé?
On ignora les supplications, les tentatives d'expliquer, les excuses et les "comprenez". Il n'y eut d'ailleurs pas de procès.

On pendit la bête en plein soleil, le regarda se tortiller alors qu'il expiait ses pêchés. On ne fit même pas le bon geste de faire venir le prêtre du village. Point de salut pour l'âme des monstres! Point de pitié.
Lorsqu'il eut finit de s'agiter, et que seul le vent le faisait bouger, on alluma un grand feu sous la potence, et on dansa jusqu'à ce qu'il eut tout consumé.

La victime pleurait, des larmes de la reconnaissance, tout le monde pouvait l'assurer. Et, une fois que tout finit, les habitants rentrèrent chez eux comblés. Comblés d'avoir tué la vilaine bête, le monstre sans cœur.


Cet homme immonde dont le crime impie fut d'aimer le Bûcheron.




Il était une fois, dans un village des plus affreux, un homme de bien qui finit pendu par des monstres.